sexta-feira, 8 de maio de 2015

Paragraphe

"Et il y un jour aussi où elle me dit: "Vous savez, vous pouvez m'appeller Gilberte, en tous cas moi, je vous appellerai pour votre nom de baptême. C'est trop gênant." Pourtant elle continua encore un moment à se contenter de me dire "vous" et comme je lui faisais remarquer, elle sourit, et composant, construisant une phrase comme celles qui dans le grammaires étrangères n'ont d'autre but que de nous faire employer un mot nouveau, elle la termina par mon petit nom. E me souvenant plus tard de ce que j'avais senti alors, j'y ai démêlé l'impression d'avoir été tenu un instant dans sa bouche, moi-même, nu, sans plus aucunes des modalités sociales qui appartenait aussi, soit à ses autres camarades, soit, quand elle disait mon nom de famille, à mes parents, et dont ses lèvres - en l'effort qu'elle faisait, un peu comme son père, pour articuler les mots qu'elle voulait mettre en valeur - eurent l'air de me dépouiller, de me dévêtir, comme de sa peau un fruit dont on ne peu avaler que la pulpe, tandis que son regard, se mettant au même degré nouveau d'intimité que prenait sa parole, m'atteignait aussi plus directement, non sans témoigner la conscience, le plaisir et jusque la gratitude qu'il en avait, en se faisant accompagner d'un sourire."

Marcel Proust - À la recherche du temps perdu.

Um comentário:

  1. Até agora eu nunca tinha lido nada de Proust, muito menos em francês: tive que procurar duas palavras: "gênant" e "atteignait"/ atteindre. Parágrafo cheeeio de nuances, subliminar...

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